Le Maroc développe la préférence nationale pour ses contrats publics et contrats PPP

La propagation de la pandémie de la Covid-19 au Maroc a conduit le Gouvernement marocain à déclarer l’état d’urgence sanitaire par le décret-loi n°2-20-292 du 23 mars 2020. Les restrictions liées à l’Etat d’urgence sanitaire ont entrainé des conséquences néfastes sur l’économie marocaine. Dans ce contexte, le Gouvernement marocain a adopté des mesures pour accompagner et soutenir la reprise progressive de l’activité économique.

Dans ce sens, la circulaire n°15/2020 du 10 septembre 2020 adressée par le Chef du gouvernement aux ministres et aux ministres délégués (la « Circulaire »), vise à favoriser les mécanismes de la préférence nationale dans les marchés publics marocains.

Quels sont les thèmes principaux développés dans la Circulaire?

La Circulaire rappelle que les acheteurs publics doivent se conformer aux obligations suivantes :

l’introduction de la mention explicite de l’application des normes marocaines ou d’autres normes applicables au Maroc en vertu des accords internationaux, dans les clauses, spécifications et cahiers des charges des marchés publics ou passés par les entreprises délégataires de gestion d’un service public ou subventionnées par l’Etat (voir article 35 de la loi n°12-06 du 11 février 2010 relative à la normalisation, à la certification et à l’accréditation) ;

la limitation d’utilisation du recours aux produits et matériaux importés afin d’encourager la consommation des produits marocains. Les acheteurs publics marocains pourront toutefois y déroger si aucun produit marocain n’est conforme aux spécifications techniques demandées;

• l’application des dispositions en vigueur relatives à la préférence nationale dans la sélection des titulaires de marchés publics, que nous allons développer ci-dessous.

Quelles sont les nouveautés de 2019 en matière de préférence nationale?

Auparavant, la préférence nationale était facultative pour les acheteurs publics marocains (voir article 155 du décret n°2-12-349).

La préférence nationale consistait pour les acheteurs publics à favoriser de manière facultative, sous certaines conditions, les « entreprises marocaines » dans le cadre des procédures de passation par rapport aux entreprises étrangères. En application de ce principe, les offres des entreprises étrangères sont automatiquement moins bien notées que les offres des entreprises marocaines.

Dans le but de faciliter davantage l’accès des coopératives et des auto-entrepreneurs à la commande publique, le décret n°2-19-69 du 24 mai 2019 modifie le décret n°2-12-349 relatif aux marchés publics.

D’une part, le nouvel article 155 du décret n°2-12-349 procède à l’extension du champ d’application des structures concernées par la préférence nationale, qui visait auparavant uniquement les entreprises marocaines. Désormais, la préférence nationale concerne les coopératives, les unions de coopératives et l’auto-entrepreneur. Toutefois, des questions persistent quant à la qualification de la nationalité marocaine dès lors que le droit marocain ne définit pas précisément les critères de la nationalité.

D’autre part, l’article 155 rend obligatoire l’application de la préférence nationale à toutes les procédures de passation de marchés publics.

Quels sont les marchés concernés par la préférence nationale?

Le champ d’application des marchés concernés est limité. La préférence nationale concerne uniquement les offres relatives aux marchés de travaux et d'études y afférentes (voir article 155 du décret n°2-12-349 tel que modifié par le décret n°2-19-69).

Quelles sont les modalités d’application du mécanisme de préférence nationale?

La préférence nationale consiste à majorer les montants des offres présentées par les entreprises étrangères. Cette majoration ne doit pas dépasser 15% du montant de l’offre proposée par l’entreprise étrangère (voir article 155 du décret n°2-12-349 tel que modifié par le décret n°2-19-69).

Dans ce sens, la circulaire fixe les taux comme suit , pour une offre financière ne dépassant pas 100.000.000 Dirhams (soit environ 10.000.000 euros), le taux est fixé à 15%, en revanche, lorsque l’offre financière est supérieure à 100 M DH, il convient d’appliquer une majoration de 15% pour 100 M DH et de 7,5% pour le reste du montant.

Si le montant du marché dépasse les 100 M DH, son attribution sera soumise à l’accord préalable d’une :

  • Commission présidée notamment par le Ministre de l’Economie et des finances, composée de représentants des ministères de l’Equipement et de l’Industrie ainsi que du porteur du projet, si le marché est lancé par une administration publique ;
  • Commission présidée par le ministère de l’Intérieur et composée de représentants des ministères des Finances, de l’Equipement, et de l’Industrie ainsi que la collectivité territoriale en question, dans le cas des marchés lancés par les collectivités territoriales.
Le porteur de projet est tenu de présenter à la Commission, un rapport dans lequel il précise si le marché comporte des produits importés. Sur la base de l’étude détaillée de ce rapport, ces commissions doivent, dans un délai d’un mois, prendre une décision à la majorité sur l’attribution du marché.


Comment cela se passe en cas de candidature d’un groupement composé d’entreprises marocaines et étrangères?

Les groupements comprenant des entreprises nationales et étrangères qui soumissionnent aux marchés publics sont tenus d’appliquer le pourcentage de majoration du montant de l’offre de 15% maximum (voir article 155 du décret n°2-12-349 tel que modifié par le décret n°2-19-69). Toutefois, cette majoration de maximum 15% s’applique uniquement à la part des entreprises étrangères par rapport au montant global de l'offre du groupement. Les modalités de calcul et d’application de cette mesure restent également à définir.

Toutefois, certains sujets n’ont pas encore été abordés par la Circulaire. Une entreprise étrangère pourrait envisager soit d’anticiper cette majoration de 15% en proposant un prix 15% moins cher à l’offre de l’entreprise marocaine soit de candidater en tant que sous-traitant d’une entreprise marocaine.

 

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