Modernisation du droit de la concurrence marocain : ce qu’il faut retenir

La loi n°40-21 du 25 novembre 2022, récemment publiée au Journal officiel, est venue modifier les dispositions du droit marocain de la concurrence afin de le moderniser et de combler certaines lacunes.

Cette réforme apporte des modifications aussi bien au régime de contrôle des concentrations qu’au droit des pratiques anticoncurrentielles. Les principaux apports de cette loi sont les suivants :

Contrôle des concentrations

  • La loi prévoit dorénavant trois seuils de notification alternatifs, dont les niveaux de chiffre d’affaires devra être précisé par voie règlementaire :
  • un seuil exprimé en chiffre d’affaires prenant en compte cumulativement (i) le chiffre d’affaires mondial de l’ensemble des entreprises parties à la concentration et (ii) le chiffre d’affaires réalisé individuellement au Maroc par au moins une des entreprises parties à la concentration ;
  • un seuil exprimé en chiffre d’affaires, tenant compte du chiffre d’affaires réalisé individuellement au Maroc par au moins deux des entreprises parties à la concentration ; et
  • un seuil portant sur la part de marché cumulée des entreprises parties à la concentration – seuil fixé à 40 % des ventes, achats ou autres transactions sur un marché national de biens, produits ou services de même nature ou substituables, ou sur une partie substantielle de celui-ci.

Cette révision des seuils conduit à l’abandon du seuil alternatif basé exclusivement sur le chiffre d’affaires mondial des parties qui conduisait à devoir potentiellement notifier des opérations entre sociétés étrangères n’ayant aucune activité et aucun chiffre d’affaires au Maroc.

  • La loi instaure une procédure de notification simplifiée pour les opérations les plus simples, lesquelles seront définies par voie règlementaire.
  • La loi précise que les opérations de concentration réalisées au cours d’une période de deux années entre les mêmes entreprises seront traitées comme une seule opération pour les besoins du calcul des seuils de notification. Cet ajout vise à contrecarrer les stratégies de contournement du contrôle des concentrations consistant à fractionner une opération en plusieurs opérations successives afin de rester sous les seuils de notification.
  • Enfin, l’examen des notifications sera désormais payante, avec la création d’une redevance, dont le montant sera précisé par voie réglementaire, à la charge des entreprises notifiantes.

Pratiques anticoncurrentielles

  • La loi crée une procédure de transaction qui remplace la procédure de non contestation des griefs. Cette procédure permet aux entreprises acceptant de ne pas contester les griefs de se voir proposer une fourchette de sanction pécuniaire réduite.
  • La loi précise les éléments qui seront pris en compte dans le cadre de la détermination du montant des sanctions pécuniaires. Parmi ces critères figurent le chiffre d’affaires et les ventes liés à l’infraction, la durée de l’infraction, les gains illicites, le degré d’implication de l’entreprise dans l’infraction, la gravité des faits ou encore l’importance du dommage causé à l’économie.
  • Le Conseil de la concurrence pourra également tenir compte d’éventuelles circonstances aggravantes et/ou atténuantes dans le calcul des sanctions pécuniaires. La récidive ou le rôle leader l’entreprise durant l’infraction pourront notamment venir alourdir la sanction. A l’inverse, le faible niveau de participation de l’entreprise à l’infraction ou la cessation de la pratique de la propre initiative de l’entreprise pourront constituer des circonstances atténuantes.
  • La coopération de l’entreprise mise en cause à l’enquête pourra également être pris en compte par le Conseil de la concurrence pour moduler le montant de la sanction.

Autres mesures notables

  • La loi précise que les arrêts de la Cour d’appel de Rabat ayant confirmé, annulé ou réformé une décision du Conseil de la concurrence pourront faire l’objet d’un recours auprès de la Cour de cassation.

Portée par le gouvernement, cette réforme vise à moderniser les règles du droit de la concurrence afin de le rapprocher des standards des régimes d’autres pays industrialisés et ainsi offrir aux entreprises des règles plus lisibles et des procédures simplifiées.

Le décret visant à préciser et compléter le dispositif, notamment en précisant les seuils de chiffre d’affaires déclenchant l’obligation de notification, devrait être publié prochainement par le gouvernement.

L’équipe Concurrence de Bird & Bird se tient à votre disposition pour vous permettre d’assurer la conformité de vos opérations et de vos pratiques au droit de la concurrence marocain.

 

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