La pratique relativement répandue jusqu’alors d’interdire toute revente par le biais de places de marché en ligne semble remise en cause par l’Autorité de la concurrence qui a récemment précisé que, s’il est possible d’imposer des critères de qualité aux places de marché, il n’est pas possible de les exclure par principe.
Les plateformes internet telles Amazon, Ebay, PriceMinister connaissent, en dépit de leur succès commercial, la défaveur des fournisseurs en raison de leur politique de prix agressive. Nombre de fournisseurs ont ainsi fait obstacle à la commercialisation de leurs produits sur ces plateformes. L’Autorité de la concurrence dans une affaire récente a posé des limites à cette pratique.
La Commission européenne dans ses lignes directrices sur les restrictions verticales a admis que les fournisseurs puissent exclure de leur réseau de distribution sélective les revendeurs uniquement actifs sur internet (les « pure players »). Les fournisseurs ont cependant perçu le risque que certaines plateformes reviennent dans le jeu en leur qualité de places de marché, portant les offres en ligne des distributeurs agréés. Certains fournisseurs ont ainsi cherché à empêcher leurs distributeurs de revendre les produits par l’intermédiaire de places de marché en ligne, soit par le biais d’une interdiction générale, soit par le biais de critères qualitatifs auxquels les places de marché ne peuvent pas répondre.
Cette pratique semblait légitimée par les lignes directrices de la Commission qui précisent que dans l’hypothèse où le site internet du distributeur est hébergé par une plateforme tierce, le fournisseur peut « exiger que les clients n’accèdent pas au site du distributeur via un site qui porte le nom ou le logo de la plateforme tierce ». Cette précision semblait valider la possibilité d’exclure les places de marché telles Amazon ou Ebay qui se présentent aux internautes sous leur propre « enseigne ».
Cette pratique semble devoir être remise en cause par la position récemment affichée par l’Autorité de la concurrence qui s’oppose à une exclusion de principe des places de marché en ligne. Cette position a été rendue publique dans le cadre d’un communiqué de presse dans lequel l’Autorité de la concurrence a annoncé avoir clos en novembre 2015 une enquête à l’encontre d’Adidas en contrepartie de l’engagement par ce fabricant de supprimer de ses contrats de distribution toute clause interdisant à ses distributeurs de recourir à des places de marché en ligne.
L’affaire est passée relativement inaperçue dans la mesure où elle n’a pas donné lieu à une décision formelle de l’Autorité de la concurrence, l’engagement d’Adidas de modifier ses contrats ayant été souscrit avant toute saisine officielle. Il en résulte que les circonstances de l’espèce restent relativement peu connues mais il semblerait que les contrats d’Adidas contenaient une clause prévoyant une interdiction générale pour les distributeurs de commercialiser les produits via des places de marché en ligne.
Il est intéressant de noter que c’est l’autorité de concurrence allemande qui a attiré l’attention de l’autorité française sur cette pratique d’Adidas, l’autorité allemande ayant obtenu de ce fabricant le même engagement d’éliminer la clause d’interdiction de revente via les places de marché en ligne un an auparavant.
L’Autorité de la concurrence a précisé que, à la suite de la modification par Adidas de ses contrats, les revendeurs pourront désormais utiliser les places de marché sous réserve qu’elles respectent certains critères qualitatifs qui leur permettront d’être agréées par le fabricant. L’Autorité de la concurrence valide ainsi la possibilité pour le fournisseur d’opérer une sélection parmi les places de marché en ligne sur la base de critères qualitatifs objectifs.
L’Autorité ne donne cependant aucune précision quant aux critères qualitatifs qui pourront être appliqués à ces places de marché. Tout au plus peut-on rappeler que, conformément aux lignes directrices de la Commission, ces critères devront être « globalement équivalents » à ceux imposés pour la vente dans un point de vente physique.
Les fournisseurs devront dorénavant: